Beaucoup de questions se posent quant à l’arrêt du tabac lors de la grossesse. Ce dont on est sûr, c’est que les effets tératogènes* du tabac fumé sont particulièrement préjudiciables pour le développement du fœtus et sont très bien documentés. Il devient donc nécessaire de trouver une solution pour les femmes n’arrivant pas à arrêter de fumer pendant cette période. Depuis longtemps, des traitements de substitution sont proposés aux femmes, principalement sous forme de patchs. La cigarette électronique est de plus en plus proposée dans ce cadre. Dans une étude parue le 16 mai 2022 et publiée dans la revue Nature, une équipe de chercheurs, constituée autour de Francesca Pesola, se propose de comparer l’efficacité et la sécurité des patchs et des e-cigarettes sur les femmes enceintes.
Traduction de l’étude ici.
*Une substance « tératogène » est susceptible de provoquer des malformations chez les enfants exposés in utero. Dans la population générale, environ 2 % des enfants naissent avec une malformation majeure. Un produit tératogène augmente cette fréquence globale ou seulement celle d’un type spécifique de malformations.
Résumé
Les thérapies de substitution à la nicotine sont souvent proposées aux femmes enceintes. Majoritairement sous forme de patchs, ces traitements sont jugés peu efficaces. La cigarette électronique est aussi de plus en plus proposée aux femmes enceintes mais leur efficacité et leur sécurité n’ont pas fait l’objet de recherches comparatives jusqu’à présent. L’équipe de Francesca Pesola s’est attelée à un essai contrôlé randomisé mené auprès de 1140 patientes. Les participantes ont été randomisées dans deux groupes : patchs (571) et e-cigarettes (569). L’étude s’est déroulée en Angleterre et les participantes ont été recrutées dans les centres Stop Smoking Services et dans 23 établissements hospitaliers. Les participantes avaient un âge moyen de 27 ans, fumaient 10 cigarettes/jour et étaient enceinte de 15,7 semaines, toujours en moyenne.
Résultats
Les résultats de cette étude ont été découpés en deux phases. La première, dite primaire, montrait une différence non-significative d’efficacité. Cependant, un certain nombre de biais, notamment sur le retour des échantillons de salive, ont montré que ce résultat n’était pas pertinent. Lors de l’analyse secondaire, les biais ont été écartés et l’on peut constater une efficacité supérieure de la e-cigarette : 6,8% d’abstinence contre 3,6% ; c’est presque 2 fois plus et conforme à l‘étude générale Cochrane.
Concernant la sécurité, rien de notable n’a été enregistré et les deux méthodes de substitution présentaient des profils de sécurité similaires. Étonnamment, l’étude montre que l’insuffisance pondérale à la naissance était moins élevée dans le groupe e-cigarette. L’insuffisance pondérale est un des effets bien connus du tabagisme pendant la grossesse. Les autres évènements indésirables et les résultats d’accouchements étaient similaires dans les deux groupes.
Côté nicotine, les études démontrant les problèmes inhérents étaient réalisées sur des animaux. Au final, les problèmes potentiels avec la nicotine seront identiques avec des TSN ou de la vape. Aujourd’hui, on ne sait pas si la nicotine pose des problèmes sur l’humain aux doses auxquelles les fumeurs sont exposés. Deux études récentes ont conclu qu’il n’existait aucune preuve claire de la nocivité des TSN sur le fœtus. A la lumière de l’étude présente, vapoter ne représente pas plus de danger que l’utilisation de patchs.
Conclusion
Cette étude démontre donc que l’usage de la vape pendant la grossesse semble plus efficace dans l’arrêt du tabac que les substituts nicotinique. Du point de vue sécurité, les deux méthodes ont des résultats similaires. Encore une fois, cette étude vient tordre le cou à beaucoup d’idées reçue sur le vapotage durant la grossesse. Bien sûr, si les femmes enceintes peuvent cesser de fumer sans substitution, cela sera toujours préférable. Mais dans le cas d’une impossibilité, il faut savoir qu’il existe plusieurs méthodes et que leurs conséquences sont identiques.