Effet passerelle de la vape : et si nous prenions le problème autrement ?


 

Jeune Vapoteuse

Cela fait des années que l’on évoque, comme un épouvantail, le possible passage du vapotage vers le tabagisme pour les jeunes. Selon les pays, les résultats d’études sont contradictoires. Oui pour les USA et non pour la France par exemple. Des études américaines alarmistes ont pointé la vape comme une initiation conduisant à un tabagisme ultérieur.  En France, on constate que cet effet est marginal. Mais force est de constater qu’il subsiste des faiblesses dans les conclusions des études démontrant l’effet passerelle ; de l’aveu même des scientifiques ayant conduit ces études. Il apparaît donc qu’il faut regarder ce sujet de plus près, en y ajoutant d’autres facteurs confondants. C’est ce que propose d’éclaircir cette étude publiée l’an passé. Traduction ici.


Introduction

L’étude de Ruoyan Sun, David Mendez et Kenneth E Warner se propose de regarder de plus près l’association entre la pratique du vapotage et le tabagisme ultérieur chez les jeunes. Les auteurs se sont rendu compte que les différentes études sur le sujet ne prenaient pas en compte certains facteurs qui pourraient avoir une importance cruciale. De plus, les auteurs de ces études eux-mêmes, ont signalé qu’il convenait de rester prudent sur les conclusions apportées à leurs résultats. Mais, évidemment, les activistes anti-vape américains bien connus en ont profité pour interpréter les résultats à leur sauce. Comme toujours, il y a la science et il y a les idéologies. Les deux sont incompatibles, et malheureusement, ce sont les idéologues qui font le plus de bruit ; influençant en cela le public et surtout les politiques publiques. En même temps, les pouvoirs publics préfèrent plaire à leurs électeurs plutôt que prendre en compte les faits. Ce n’est pas nouveau.

Méthode

Données

L’étude est basée sur les données du PATH (Population Assessment of Tobacco and Health)*. Elle utilise un modèle de régression logistique multivariables en incluant plus de facteurs de risques que les études précédentes. Dans ces facteurs de risques, ont peut citer : les caractéristiques sociodémographiques, l’exposition aux fumeurs, la sensibilité à la cigarette et les facteurs de risque comportementaux. Ces données sont tout autant cruciales si l’on veut mesurer, le plus fidèlement possible, le risque de passer au tabagisme à combustion.

*Le PATH est une étude longitudinale nationale américaine sur le tabagisme et ses effets sur la santé des personnes aux États-Unis. Des personnes de tout le pays participent à cette étude. L’étude PATH, qui a débuté en 2013, est l’un des premiers grands efforts de recherche sur le tabac entrepris par les National Institutes of Health (NIH) et la Food and Drug Administration (FDA) depuis que le Congrès a donné à la FDA le pouvoir de réglementer les produits du tabac en 2009.

Critères de risques

Dans les caractéristiques sociodémographiques, on prendra en compte plusieurs facteurs qui sont : l’âge des sujets, le sexe, l’ethnie, le niveau d’éducation et les revenus familiaux. Ces critères sont importants dans la mesure où, on le sait depuis longtemps, ces facteurs ont un fort impact sur le tabagisme.

L’exposition aux autres fumeurs est tout aussi importante par l’effet de mimétisme mais aussi via l’exposition à la fumée secondaire des fumeurs, notamment dans le cadre familial.

La susceptibilité au tabagisme a été mesurée selon quatre questions permettant de savoir si les jeunes non-fumeurs serait tentés de fumer. Les raisons peuvent être, la curiosité, l’envie d’expérimenter des choses nouvelles ou simplement la défiance. Nous avons tous été ados et l’on sait que cette période de la vie est cruciale pour ce type de comportements.

Enfin, les facteurs de risques comportementaux permettent de vérifier si les jeunes sont consommateurs d’autres substances psychotropes pouvant mener au tabagisme : alcool, cannabis ou d’autres produits du tabac. S’agissant de l’alcool, par exemple, nous savons tous, en tant qu’ex fumeurs, que les soirées arrosées font quasiment doubler la consommation de tabac fumé ; si ce n’est plus.

Conclusion

Cette étude conclut ce qu’avait déjà conclu l’étude française ainsi que l’étude britannique de Lion Shahab : parmi les adolescents n’ayant jamais fumé et ayant expérimenté la vape en première instance, l’augmentation du nombre de fumeurs ultérieurs est modeste ou non-significative, par rapport à ceux n’ayant jamais utilisé la vape. Tirer des conclusions hâtives avec des données interprétées selon une certaine idéologie n’est pas scientifique et procède de la désinformation. C’est justement ce que subissent les citoyens américains en ce moment.  Nous vous encourageons à lire cette étude via le lien au début de l’article (étude traduite) car elle souligne l’importance des facteurs mentionnés dans l’étude. Nous le savons depuis longtemps, il y a beaucoup plus de fumeurs dans les CSP* à faible revenus. De même, le fait d’avoir un parent fumeur est aussi un grand facteur de risques. Votre serviteur peut en témoigner pour avoir passé toute son enfance et adolescence avec un père fumeur et à une époque où on ne se souciait pas des fumeurs passifs. Dire que l’on devient fumeur parce qu’on a expérimenté la vape n’est en aucun cas prouvé scientifiquement. Quoiqu’il en soit, la réponse reste compliquée car la chaîne des causes et des conséquences est difficile à démontrer. Mais ce que l’on sait de façon très solide, c’est que la vape est au minimum 95% moins dangereuse que la tabac fumé. Essayer d’enterrer une alternative à la cigarette à cause d’idéaux irrationnels met les fumeurs, candidats à la défume, dans une position critique.

*Catégorie Socio-Professionnelle

Source : Is Adolescent E-Cigarette Use Associated With Subsequent Smoking? A New Look