Beaucoup d’études anglo-saxonnes ont constaté une association positive entre l’expérimentation du vapotage avec un tabagisme quotidien ultérieur chez les adolescents. L’INSERM a effectué une étude, parue début 2020, visant à chercher si ces résultats pouvaient être différents selon les cultures et/ou pays. D’autre part, peu d’études ont pris en compte le paramètre âge dans leurs résultats. L’étude est donc située sur le territoire français et se propose de mesurer l’impact du vapotage sur le tabagisme futur pour les adolescents entre 17 et 18,5 ans. Traduction complète de l’étude ici.
Contexte
Il s’agit d’une enquête nationale transversale représentative réalisée en 2017 en France, à partir des données ESCAPAD.
Participants
L’étude a interrogé 43892 adolescents âgés de 17 ans ayant déjà expérimenté le tabac fumé et/ou le vapotage. L’étude a retenu 41908 participants ayant rempli un questionnaire valide. L’échantillon final, répondant au critère d’âge, comprenait 39115 adolescents français dont l’âge moyen était de 17,4 ans (min : 17 ans – max : 18,5 ans). Parmi ces individus interrogés, 23095 avaient déclaré avoir déjà essayé de fumer. Une fois les variables nécessaires à l’étude filtrées, l’échantillon retenu pour l’étude analytique était de 21401 fumeurs.
Mesures
Le paramètre de départ était défini comme étant une expérimentation de la e-cigarette en première instance qu’elle soit suivie ou non par une expérimentation du tabac fumé. Le résultat final mesurait le tabagisme quotidien des participants au moment de la collecte des données. D’autres facteurs furent pris en compte comme : le sexe, l’âge, le niveau d’alphabétisation, le statut socio-économique (CSP), les années de redoublement avant exposition ainsi que l’usage de 11 autres drogues licites et illicites ont été pris en compte.
Résultats
Au moment de l’enquête, 59% des adolescents déclarait avoir testé la cigarette combustible et 52,4%, la vape. Pour ce qui est de la consommation sur les 30 jours précédents, les chiffres commencent à diverger avec 34,1% de fumeurs contre 16,8% de vapoteurs, soit plus du double fumeurs. Et sur cette période, l’usage quotidien de la cigarette était de 25,1% contre 1,9% pour la vape.
Ce que l’on peut aussi noter, parmi les utilisateurs doubles, c’est que 71,4% ont essayé la vape après avoir essayé de fumer, 13,2% avant, 15,4% dans la même année. Pour ce qui est des fumeurs quotidiens ayant testé le vapotage, 40,2% l’ont essayé après le passage au tabac fumé, 27,2% avant et 32,7% la même année.
Là où cela devient intéressant, c’est le rôle de la vape vers un tabagisme quotidien. Dans la population d’intérêt de l’étude, 32,1% de ceux l’ayant expérimenté étaient fumeurs quotidiens contre 49,6% pour ceux ne l’ayant jamais expérimenté.
Conclusions
Ce qui ressort de cette étude, c’est que le risque relatif de passage au tabagisme après une expérimentation de la vape est de 0,62 (95%CI=[0,60, 0,64]). Soit 38% de moins. S’agissant des jeunes français âgés de 17 ans ayant déjà fumé, le risque de passer au tabagisme quotidien est plus faible lorsqu’ils ont essayé le vapotage. Ceci, même lorsque la vape a été essayée avant de commencer à fumer. Ce qui contredit l’hypothèse de l’effet passerelle, si souvent employée pour dénigrer la vape aux USA (mais pas seulement aux USA).
Certaines études anglo-saxonnes ont constaté que les adolescents ayant expérimenté le vapotage étaient plus enclins que les autres à devenir fumeurs par la suite (occasionnels ou réguliers). Pourtant, aucune différence significative n’a été trouvée entre les deux résultats. En France, les adolescents ont tendance à commencer par expérimenter le tabac fumé puis la vape, ce qui pourrait expliquer la différence de résultats.
Evidemment, d’autres études doivent poursuivre et corroborer cette analyse, et notamment avec des cohortes de sujets plus âgés afin de vérifier l’impact de la vape sur les comportements tabagiques, plus tard dans la vie.