A quoi faut-il s’attendre en 2023 pour la vape ?


 

2023 semble être une année charnière pour le vapotage. Des sujets centraux sont au cœur des débats législatifs concernant notre dispositif de sevrage favori. Et manifestement, ce n’est pas toujours pour la bonne cause. Ces sujets sont au nombre de trois : les dispositifs jetables, les taxes d’accises et les interdictions d’arômes… Rien que ça. Tout cela est en relation avec la peur grandissante, partout dans le monde, de voir les jeunes s’adonner à une nouvelle « addiction ». Le mot addiction, concernant la vape, est inapproprié. Mais en la matière, les arguments dans anti-vape ne s’embarrassent pas des précautions oratoires de circonstance. Quoi qu’il en soit, cet argument est le prétexte à un certain nombre de restrictions et taxations qui semblent se profiler pour l’année qui vient. Petit tour d’horizon…


Taxes d’accise

Dans le monde

Un certain nombre de pays ont déjà des projets de taxes dans leur besace. On peut citer le Koweit avec un projet des taxes à 100% mais finalement repoussé aux calendes grecques. l’Arabie Saoudite prévoit une taxe de 150% sur tous les produits du tabac. l’Afrique du Sud a un projet de lois fiscales pour 2023 dans lequel la vape, nicotinée ou non, subirait une taxe d’accise. Aux USA, il est fort probable qu’une nouvelle tentative de taxe sur la nicotine arrive sur le tapis au niveau fédéral. En 2022, la Chine a alourdit la charge réglementaire et fiscale ce qui pourrait avoir des conséquences sur le marché intérieur. 

En Europe

l’Union Européenne n’est pas épargnée avec cette vague de mesures fiscales. les négociations sur la directive relative aux accises sur le tabac (TED) domineront l’année dans l’UE. Nous savons également que les travaux sur la TPD version 3 vont reprendre. Pour la Commission, tabac fumé, tabac chauffé et vape, tout ça, ce sont des produits du tabac. Allez hop ! Pas de jaloux. C’est pourquoi nous devons être très vigilants. Certains Etats membres ont déjà devancé l’appel et leurs législations pourraient faire jurisprudence.

La Bulgarie prévoit des droits d’accise (à partir de mars) et des timbres fiscaux (à partir de décembre) pour les e-cigarettes contenant de la nicotine, ce qui en fait des produits du tabac à des fins fiscales. L’Estonie, où le ministre des finances a refusé la prolongation de suspension de deux ans des droits d’accise. De fait, ceux-ci ont été réintroduits au 1er janvier malgré l’opposition du secteur. En Espagne, un droit d’accise sur les e-liquides a été prévu mais n’aura probablement pas lieu avant les élections de décembre prochain. En Italie, il est probable qu’un projet de loi budgétaire de 2023, bloquant l’augmentation prévue du droit d’accise sur les e-cigarettes pour 2023, sera approuvé.

Hors UE, la Suisse aussi est dans la partie avec un amendement de la loi, approuvée par le Conseil Fédéral, visant à introduire une taxe sur les e-liquides avec un taux tenant compte de la moindre nocivité par rapport au tabac combustible.

Interdiction des arômes

On en parle depuis quelques temps avec toujours cette peur d’attirer les plus jeunes. Du coup, il faut s’attendre à une législation plus restrictive partout dans le monde ; voire à une interdiction totale des arômes autres que tabac et menthe. De nouveaux états américains pourraient envisager une telle interdiction. Certains états le pratiquent déjà comme la Californie qui interdit même l’arôme de menthe. Idem dans le Massachusetts, le New Jersey ou le Rhode Island. Avec le principe de subsidiarité à l’américaine, on peut même se retrouver avec des législations différentes selon les villes. L’interdiction est ainsi effective à : Chicago, Los Angeles (entrée en vigueur en 2023), San Diego, Sacramento, Oakland, San Jose et Boulder. Des centaines de villes et de comtés plus petits, principalement en Californie, interdisent les arômes, tout comme certaines grandes villes dont les interdictions ont été remplacées par des interdictions d’État (comme New York et Newark, NJ).

Pour l’Union Européenne, la Lettonie est en train de valider une loi interdisant les e-liquides et les e-cigarettes aromatisés. L’Estonie voisine, en revanche, la loi pourrait s’assouplir. Cela dit, même si cette nouvelle législation reviendra sur l’interdiction totale des produits de vapotage aromatisé, elle continuera à interdire les produits aux arômes « sucrés », « boissons gazeuses » ou « confiserie ». Les fuites et les gourmands étant tous sucrés (et même certains tabacs), je ne vois pas bien ce qu’il en restera. Plus près de nous, et de façon totalement incompréhensible, les Pays-Bas viennent d’interdire les arômes (au 1er janvier). Cependant, il reste des détails encore en suspens 

Les déchets

L’importance accrue accordée aux mesures de réduction des déchets conduira à des réglementations sur les composants à usage unique tels que les plastiques et les accus ; règles qui affecteront certainement les e-cigarettes jetables ou puffs. Pour le moment, on en parle en France, mais il se pourrait que ce sujet soit également inclus dans la TPD V3.

Le Parlement européen et le Conseil devraient examiner la proposition de la Commission visant à réviser la directive sur les emballages et les déchets d’emballages, présentée à la fin du mois de novembre 2022. La révision vise à prévenir la production de déchets d’emballages, à les réduire en quantité et à garantir que tous les emballages sont recyclables, ainsi qu’à accroître l’utilisation de plastiques recyclés dans ceux-ci. Les nouvelles règles pourraient affecter l’emballage des produits de vapotage.

Sur un autre plan, un nouveau règlement concernant les accus devrait aussi voir le jour. Il réglementera l’ensemble du cycle de vie des accus, de leur conception à leur élimination. Il couvrira un large éventail d’accus, y compris les accus industriels et portables, ce qui pourrait affecter les accus des appareils de vape. Reste à savoir sous quelle forme.

En France

Concernant la France, nous savons qu’il y a un projet de loi qui devrait être présenté prochainement au parlement. Celui-ci concerne l’interdiction des dispositifs jetables. Il s’agit du projet de loi 464 que l’on peut consulter ici. Donc, pas d’interdiction de la vape « traditionnelle » mais seulement des dispositifs à usage unique. Sur ce sujet, les avis sont toujours très partagés. Ce qui est sûr, c’est que c’est une aberration écologique.

A propos de ce projet de loi 464, on peut lire à l’article 2 : « La perte de recettes résultant pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services. ». J’avoue avoir bondi de mon siège en lisant cela. Qu’est-ce que cela veut dire ? Ca y est, la taxe d’accise arrive déjà en France ? Il faut avouer que ça n’est pas clair, jeté comme ça. En fouillant un peu, il s’agirait en fait d’une autre question. Une proposition de loi peut aborder plusieurs sujets sans relation directe entre eux. Le conseil constitutionnel indique ainsi qu’il est prévu une majoration de la taxe d’accise sur le tabac (fumé pour le coup) afin de compenser les pertes de recettes fiscales (état et sécurité sociale) dues à la conversion de certains jour de repos, pour les salariés, en majoration de salaire. Mais bon. Méfions-nous des textes un peu trop vagues ouvrant le champ des possibles.

En France, pas de bannissement des arômes à l’horizon. Mais attention. La TPD V3 commence à pointer le bout de son nez.

TPD V3

Des indiscrétions ont mis en lumière une mise en place possible de droits d’accise sur les e-liquides avec une taxe progressive selon le taux de nicotine. De fait, toute l’UE serait concernée avec obligation de transposition, à minima, en droit national. 

Avec les taxes d’accise, sujet très clairement abordé dans la TPD V3, subsiste également le spectre du bannissement des arômes. On ne sait pas encore si ce point sera inclus dans la future TPD. Ce que l’on sait, c’est que les législateurs européens proposent un bannissement des arômes dans le tabac chauffé afin d’éloigner les plus jeunes du produit. Annonçant la proposition de modification de la réglementation européenne existante, visant à supprimer l’exemption sur la vente de produits du tabac aromatisés qui s’applique actuellement aux e-cigarettes et autres produits du tabac chauffés, la Commission a déclaré que les volumes de vente de ces produits avaient augmenté d’au moins 10 % dans au moins cinq États membres, ajoutant que le volume des ventes de produits du tabac chauffés au niveau du détail dépasse désormais 2,5 % des ventes totales de produits du tabac au niveau de l’Union. Amalgames et incompréhension de la notion de réduction des risques étant faits, on peut craindre qu’une telle interdiction puisse être intégrée dans la TPD V3.

La révision de l’actuelle TPD ne devrait pas voir le jour avant 2024. Mais c’est au cours de l’année 2023 que le débats auront lieu. Ces débats détermineront la forme de la future législation. Les question cruciales seront donc les droits d’accise, le bannissement des arômes et la gestion des déchets (avec éventuellement l’interdiction de ventes des dispositifs jetables).

Dispositions générales

Plusieurs juridictions prévoient d’adopter une réglementation plus générale sur le vapotage. Il s’agit notamment de l’Union économique eurasienne (EAEU), comprenant la Russie, l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan et le Kirghizstan, où des réglementations techniques communes pour les produits à base de nicotine entreront en vigueur. Le Chili, l’Afrique du Sud et l’Ukraine devraient entériner des dispositions similaires à la TPD ainsi qu’au Vietnam. Pour l’Ukraine … ça n’est sans doute as la priorité.

En Malaisie, un projet de loi vise à interdire la vente et l’utilisation des produits de vapotage et cela risque de susciter un débat animé.

Au Royaume-Uni, le plan de contrôle du tabac tant attendu devrait être publié en 2023. Mais il y a de fortes chances que la vape soit peu ou pas affectée. Le Royaume-Uni est à la pointe de la réduction des risques avec la vape et n’a sans doute pas l’intention de freiner l’élan observé depuis des années. Des demandes de licences médicales pour les e-cigarettes sont toutefois attendues en 2023.

Aux États-Unis, de nouvelles ordonnances de refus de commercialisation (MDO) devraient continuer à limiter sévèrement le marché légal du vapotage, bien que d’autres actions en justice soient également prévues.

A contrario, la Norvège devrait lever l’interdiction des produits de vapotage contenant de la nicotine, tandis que la République tchèque devrait adhérer davantage aux principes de réduction des risques, ce qui pourrait avoir un impact positif sur les produits à risques réduits.

Au Pérou, un projet de loi réglementant les e-cigarettes devrait être adopté pour la première fois. Celui-ci imposant des restrictions sur les ventes, les importations, la publicité et l’utilisation.

Et puis, il y a cette fameuse législation en Nouvelle-Zélande qui pourrait faire des petits, notamment au Royaume-Uni. Rien de sûr pour le moment et le monde entier aura les yeux rivés sur ce qui se passe chez les kiwis. Cette loi ne concerna pas la vape pour le coup, bien au contraire, mais cela pourrait avoir un impact sur la lutte contre le tabagisme dans le monde.

Conclusion

On le voit, l’interdiction des arômes autres que tabac, ou éventuellement menthol, commence à s’étaler partout dans le monde et même en Europe, avant même une législation globale. On le sent venir en Europe, cette histoire de bannissement des arômes fera son chemin.

Fiscalement, nous assistons, partout dans le monde, à une certaine fébrilité. Qu’est-ce que cela veut dire ? Le vapotage fait peur … mais pourquoi au juste ? La santé publique ? La science nous prouve que non depuis des années. On pourrait en conclure que c’est autre chose. Moins de ventes de tabac signifie moins de rentrée d’argent pour l’état. S’agissant de la France, on parle de 18 milliards d’euros. C’est tout sauf négligeable. Désolé pour le cynisme, mais les états ne sont pas à ça près quand il s’agit des recettes publiques.

Concernant les dispositifs jetables, l’exemple de la France pourrait être, pour l’Union Européenne, un exemple à suivre. Cela dit, il faut tout de même reconnaître que ces dispositifs sont vraiment des aberrations écologiques. Je vous propose de regarder une vidéo à ce sujet qui démontre l’ampleur des dégâts : https://www.youtube.com/watch?v=ZhSLxlHFdVE&t=593s

Quoiqu’il en soit, nous avons du pain sur la planche pour 2023. Et très bonne année à toutes et tous !


Source : Where do we go now? ECigIntelligence’s guide to regulation expected in 2023